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Participer à une réunion de discussion en Picardie

La Picardie compte trois départements pour une superficie de presque 20 000 Km2, soit une fois et demi celle de l'Ile de France, mais une population presque dix fois inférieure à cette même Ile de France. Avec une densité de population d'à peine 100 habitants au kilomètre carré (contre presque 1000 en IDF), il est plus difficile de trouver un lieu de réunion pour les gens intéressés au bouddhisme Soka.
Malgré cette difficulté, j'ai finalement trouvé un lieu de réunion à Compiègne où je me rendrais mardi 7 avril prochain.
Compiègne est à une trentaine de kilomètres de Senlis, où j'habite et où il n'y a pas encore de lieu de réunion Soka. Ce genre de distances est assez commun dans notre mouvement qui ne compte qu'environ 10 000 pratiquants répartis inégalement sur tout le territoire français de la métropole et de l'outre-mer.

Traditionnellement, les réunions de discussions forment l'essentiel de l'activité de congrégation du mouvement Soka dans le monde. Les pratiquants d'une même localité se réunissent régulièrement au domicile de l'un d'eux pour pratiquer ensemble la liturgie, puis pour prendre le temps d'échanger des points de vues et des expériences personnelles sur une thématique choisie. C'est l'occasion pour chacun d'aborder des incompréhensions, de faire part de ses interrogations et poser des questions. C'est aussi le moment de relater un parcours personnel, les détails d'un événement marquant et d'offrir une interprétation individuelle de l'expérience du bouddhisme au quotidien.
Participer à une réunion de discussion est une expérience particulière. Non qu'il s'y déroule des phénomènes paranormaux, ou bien qu'il s'agisse d'une séance de dynamique de groupe ou de psychothérapie collective. Participer à une réunion de discussion Soka rejoint le mode de congrégation le plus ancien et le plus fondamental que l'on puisse trouver. Les pratiquants et leurs amis ou invités se rassemblent en privé, sans le concours d'aucun directeur de conscience ecclésiastique ou laïc, et pratiquent le culte (liturgie, discussion libre, commentaires du corpus d'étude) de manière indépendante d'une église, d'un temple ou d'une institution officielle.

Les réunions de discussion sont à l'image des premiers groupes religieux de tous les courants existants. En cela, ces groupes conservent à la fois la tradition et le dynamisme originel de la spiritualité.
A l'intérieur du groupe, plusieurs rôles se distinguent. L'hôte, qui ouvre son domicile pour le rassemblement, y joue une partie déterminante. Il n'y a rien d'aisé à ouvrir l'endroit où l'on vit (que ce soit en famille ou seul) à des étrangers, tout coreligionnaires qu'ils soient. Accueillir une réunion de discussion est en soi un exercice formateur et un défi pour l'hôte (ou les hôtes), mais les bénéfices en termes d'ouverture et de construction personnelle sont multiples.
Une autre fonction est celle des animateurs et animatrices, que l'on nomme un peu à tort : responsables. Par une réunion de travail et de prière préalable, ils et elles se sont concertés pour choisir le sujet, prévoir le nombre de participants et organiser de manière informelle le déroulement de la réunion. Bien que la mise en place prenne une grande part dans l'organisation, c'est surtout la prière commune qui a une influence majeure sur la manière dont se déroulera la réunion de discussion. Et c'est dans ce sens seulement que le terme de responsable est adéquat. Les animateurs et animatrices prennent vraiment la responsabilité de produire une réunion chaleureuse, ouverte, où chacun viendra tel qu'il est en repartira enrichi par sa participation personnelle (si modeste ou discrète soit-elle) et ses échanges avec les autres.
Les participants pratiquants comme non pratiquants forment l'essentiel des acteurs de la réunion de discussion. Malgré le soin apporté par les hôtes et les animateurs pour l'organisation physique et le déroulement de la réunion, c'est sur la participation des invités, pratiquants comme non-pratiquants que repose la substance de l'événement. Il s'agit pour les animateurs d'encourager de manière subtile et chaleureuse les invités à faire part de leurs questionnements et à partager leurs expériences.

La réunion de discussion est en soi un tour de force et il n'est pas étonnant qu'elles soient rares. Dans une semaine, c'est à Compiègne que se déroule la prochaine réunion de discussion qui sera ma première participation en Picardie.

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Comment devient-on bouddhiste en Picardie ?

La question est sérieuse. La réponse aussi. On ne devient pas bouddhiste comme l'on entre en religion. Il est même difficile de dire si le bouddhisme est une religion ou une philosophie ou, tout simplement, un code éthique. Mais le bouddhisme est très certainement une pratique. Alors, il ne reste plus que l'expérience personnelle pour décrire le passage entre le moment où l'on ne pratique pas encore le bouddhisme et celui où on le pratique.

Je me souviens très précisément de ma rencontre avec le bouddhisme, il y a maintenant 22 ans. J'habitais chez mes parents, dans une banlieue très moche de la région parisienne et j'appréhendais le moment fatidique où je devrais aller servir sous les drapeau comme tous les jeunes hommes de mon âge. En quête de sens dans la vie, j'avais lu beaucoup, de manière anarchique et en dehors de tout parcours scolaire ou universitaire de nombreux ouvrages sur les religions, les spiritualités du monde, la magie, l'ésotérisme, l'occulte, etc. J'avais une haute opinion de l'activité spirituelle et les traditions orientales me semblaient parfaitement exotiques et très éloignées de mes préoccupations quotidiennes et de mes vicissitudes de jeune homme.
Mon père avait déserté le foyer familial assez discrètement et très progressivement et ma mère s'était incarcérée dans une routine complexe faite d'une foule de détails et de trois enfants en âge d'aller vivre leurs propres vies ailleurs mais qui profitaient au maximum des derniers moments de dépendance avant d'être parachutés dans ce monde cruel. L'appartement de 90 mètres carrés que nous occupions à Aubervilliers (93) suffisait à peine à contenir les débordements psychologiques et hormonaux de chacun et l'endroit commençait à ressembler à un quartier assiégé avant l'assaut.

Quelle ne fût pas ma surprise quand Maman nous annonça que nous étions invités un samedi à prendre une collation chez une voisine saluée régulièrement mais pas vraiment intime. Elle organisait, disait ma mère, sa première réunion sur le bouddhisme. Du bouddhisme à Aubervilliers ! J'étais plus outragé que stupéfait. Comment une philosophie aussi complexe, aussi noble, aussi spirituelle, pouvait-elle se trouver perdue dans une banlieue pourrie, à peine sortie du stade de taudis et terrains vagues. Et comment pouvait)il y avoir des moines en robe safran dans les parages sans que personne ne s'en soit aperçu.
Armé de mes a priori et d'une bonne dose de cynisme post-adolescent, je me rendais le samedi suivant à cette fameuse réunion. Profitant du buffet, j'invitais quelques copains de la résidence. Mon frère et ma sœur en faisaient de même. Le clan tout entier vint sonner à la porte de la voisine. Ravie et visiblement dépassée, elle nous fit entrer dans son appartement pour rejoindre une dizaine d'autres personnes qui par un prompt renfort passèrent à plus d'une vingtaine.
La réunion se tenait dans le salon où trônait un autel japonisant ouvragé et laqué dans lequel pendait un curieux parchemin en caractères chinois. Autour de l'autel étaient agencés un vase de feuillage, une corbeille de fruits, une boîte à encens, une coupelle à eau, quelques colifichets que je ne parvenais pas à identifier et deux portraits discrets de personnalités orientales. Les invités étaient assis en cercle qui sur une chaise, qui sur un pouf, qui par terre faute de chaises pour parer au surcroît soudain d'invités. Notre hôte nous servit des rafraîchissements et fit passer une assiette assortie de petits gâteaux.
Au cours de cette première réunion, je découvrais que nombre des personnes présentes à notre arrivée étaient des pratiquants du bouddhisme. L'un d'eux animait la réunion en essayant de son mieux d'expliquer les bienfaits de la pratique, la grandeur de l'objet de culte (la calligraphie pendant dans l'autel japonais), l'efficacité de la récitation d'un mantra et surtout ses avantages sur les nombreux et complexes rituels des autres courants du bouddhisme. Cela ressemblait à un curieux assemblage entre une réunion Tupperware, un cours sur la Bible des Témoins de Jéhova et une séance de thérapie de groupe. Nous regardions et écoutions ces gens raconter leurs déboires et comment la pratique (la récitation du mantra) avait transformé leur vie et résolu leurs problèmes.

Je me suis dit : « je bois un coup. Je mange les gâteaux et je me casse... ». On nous avait présenté le bouddhisme, les enseignements de Nichiren, la calligraphie dans l'autel et l'action de l'organisation qui diffusait la bonne parole dans le monde. Puis ce fut le moment de se présenter et d'intervenir. Poliment, chacun se présenta succinctement et on nous demanda de parler. Comme tout le monde dans pareille situation, les invités n'avaient que peu de choses à dire tant il y avait de choses à digérer et à accepter en un temps assez court. A la fois arrogant et spontané (le mélange est détonnant), je pris la parole et me mis à pérorer (parfois sans fondements ou références solides) sur ce bouddhisme, le comparant à d'autres courants (dont je ne savais que peu de choses) et surtout en critiquant les arguments apportés, le rabaissant carrément à la méthode Coué.
J'étais certain, comme je l'avais souvent fait avec les Témoins qui nous rendaient visite souvent dans notre banlieue, que la discussion tournerait court et que nous serions bientôt congédiés. Patiemment et avec beaucoup de prévenance, nos hôtes tentèrent à nouveau d'expliquer les points clés de la pratique bouddhique avec des mots moins exotiques et surtout en essayant de se faire comprendre. D'autres invités posèrent des questions. Et le dialogue se poursuivit ainsi pendant deux bonnes heures. La réunion s'acheva car plusieurs personnes devaient partir et étaient venues d'assez loin, parfois de province pour l'occasion. La voisine nous confirma qu'il y aurait une autre réunion dans une quinzaine de jours et que nous étions tous cordialement invités.
En repartant, j'avais cette curieuse sensation d'avoir participé, pour la première fois, à quelque chose de stimulant et de grand. Cette sensation que l'on a en sortant d'un concert ou bien d'un événement sportif d'envergure. Et cela en dépit de l'apparence des choses, de la faiblesse de certains arguments, des maladresses et des contradictions. Nous repartions en famille avec un petit opuscule sur le Sûtra du Lotus (plus particulièrement sur deux des chapitres de cet enseignement). Ma mère semblait intéressée par ce qu'elle avait entendu. Je restais campé sur mon idée première que ces gens, des laïcs occidentaux, ne comprenaient rien à ce qu'ils professaient. Ce bouddhisme à la japonaise ne pouvait être pratiqué que par des japonais, là-bas dans leur archipel des confins du monde.

Rétrospectivement, je me rend compte combien l'individu (moi en l'occurrence) peut être aveuglé par ses conceptions a priori et ses idées reçues essentiellement bâties sur l'imaginaire et le fantasme plutôt que sur la réalité et des faits concrets. Cet aveuglement, que le bouddhisme appelle Trois poisons, est plus simple à entretenir qu'une authentique démarche d'ouverture et de rencontre. Cette dernière nécessite à la fois une curiosité spontanée, presque enfantine, et une volonté d'aller vers les autres en se défaisant de nos a priori.
Mais ce qui me frappe encore maintenant, c'est la force intérieure démontrée tantôt timidement, tantôt maladroitement, lors de ce premier contact. Si pour nous invités, la situation avait quelque chose d'irréel et de totalement dépaysant, pour ceux qui nous recevaient et qui parfois ne pratiquaient le bouddhisme que depuis quelques années, voire quelques mois, l'expérience étaient encore plus incroyable. Comment transmettre sa propre expérience intime de la spiritualité ? Comment se dévoiler à de parfaits inconnus (arrogants et cyniques comme je pouvais l'être à ce moment là) ? Et comment conserver son calme et poursuivre sa démarche bienveillante pour faire connaître une philosophie de vie ? Il fallait quelque chose qui nous fait défaut souvent : la foi.
Bien que le bouddhisme soit avant tout une philosophie et un ensemble d'outils conceptuels permettant une représentation alternative du monde, il repose essentiellement sur la foi, la conviction que les autres ont, de manière naturelle, la même capacité d'éveil que nous. Cette posture d'esprit nécessite un véritable entraînement pour être maintenue à chaque interaction avec autrui. Il est souvent plus simple de déconsidérer l'interlocuteur et de le reléguer à une position inférieure, à un statut moindre, afin de le nier, de le neutraliser.
Cette première leçon, dont je n'ai récolté les fruits que bien plus tard, je l'ai reçue lors de cette première réunion de discussion. J'ai découvert ce jour-là que tout le monde pouvait pratiquer le bouddhisme et que cela permettait à des gens ordinaires de s'humaniser davantage pour être à l'écoute de leurs prochains.

A la réunion suivante, j'apprenais que le bouddhisme n'était pas un enseignement ésotérique, compliqué et réservé à une élite monastique. Mais ça c'est une autre histoire...

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Picardie, terre d'accueil du mouvement Soka

La Picardie est le terreau fertile d'un courant humaniste et moderne du bouddhisme. Originaire du Japon contemporain, le mouvement Soka se développe en France depuis plus de 40 ans et notamment en Picardie. Loin des traditions monastiques si caractéristiques de la vision occidentale du bouddhisme, la philosophie Soka est un outil quotidien, simple et résolument moderne pour s'éveiller à sa propre valeur, à celle des autres et à la valeur de notre environnement.
Composé essentiellement d'un réseau de groupe de discussion à travers la France mais aussi à travers le monde (la SGI est présente dans 192 pays), le mouvement Soka n'a pas vocation à un prosélytisme fermé et exclusif mais bien à la diffusion de valeurs humaines au sein de la société. Beauté, bonté et bénéfice mutuel sont les maîtres mots de notre action, qu'elle soit de terrain ou à des échelons plus vastes.

Les objectifs du mouvement Soka sont aussi essentiels que les valeurs qu'il défend : culture, éducation, paix.
Par culture, nous entendons aussi bien celle que l'on range dans les bibliothèques et des salles de spectacles, que celle plus populaire que nous échangeons dans nos conversations au zinc, à la pause, dans le train ou simplement en famille. C'est la culture vivante et plurielle, construite autour de nos coutumes, de nos idées, de nos croyances traditionnelles, de nos représentations de la famille, de la société, de notre identité.
Par éducation, nous ne nous substituons pas à l'éducation libre et gratuite qui fait encore la singularité de notre pays. En revanche, nous souhaitons apporter une véritable contribution à tous en diffusant des valeurs éthiques ancrées dans la philosophie bouddhiste, des valeurs d'éveil sur soi, sur les autres, sur le monde et sur les interactions et les liens qui nous unissent tous dans ce vaste enchevêtrement que l'on nomme univers.
Enfin par paix, nous souhaitons l'extension de la non-violence comme approche de tout conflit, l'abolition non seulement des confrontations armées mais aussi la disparition pure et simple des arsenaux nucléaires et conventionnels. C'est de loin, notre objectif le plus utopique mais aussi celui qui fourni le plus d'énergie pour opérer de réels changements dans la vie des individus. Nous pouvons penser la paix impossible dans ces termes, mais rappelons-nous que l'on pensait impossible que la Terre fusse ronde, que des hommes soient envoyés dans l'espace ou que l'Europe puisse cesser d'être le théâtre de guerres sans fin.

Pour réaliser ces objectifs, nous avons pour socle la pratique quotidienne du bouddhisme.
Il ne s'agit pas pour le mouvement Soka de devenir des moines en robe safran ou pourpre au crâne rasé, ni de s'exclure du monde en méditant durant la journée entière, ni encore de s'adonner à des exercices de relaxations. La pratique du bouddhisme Soka s'appuie sur les enseignements traditionnels du bouddhisme indien et chinois. Elle se concentre sur une liturgie simple et complètement adaptée à notre société contemporaine, formulée par Nichiren, moine japonais réformiste dont les enseignements ont donné naissance à de nombreux courants monastiques et laïcs.
Cette pratique liturgique se double d'une étude régulière des enseignements et d'un dialogue permanent entre les croyants sur leur expérience du bouddhisme dans le quotidien au cours de réunion de discussion bimensuelles par groupes d'une douzaine de personnes en moyenne. Au travers de ce travail de terrain, complètement articulé sur les individus qui le composent, le mouvement Soka propose de découvrir le bouddhisme, la philosophie humaniste de l'éveil, et de permettre à chacun de se doter des moyens d'être autonome vis-à-vis de soi comme des autres, de développer sa liberté intérieure comme extérieure et de réaliser concrètement les conditions de son propre bonheur.

De tels objectifs ne se réalisent pas en un jour. Il faut du temps et de la patience pour parvenir à se libérer de nos souffrances intérieures, de nos peurs et de nos angoisses. Il nous faut ouvrir les yeux sur la manière dont nous regardons le monde et la considération que nous lui portons. Enfin, il nous faut construire ou reconstruire la confiance en soi, en les autres, et s'éveiller ainsi à la dignité de notre propre vie, à la dignité de la vie tout court. Ce processus bouddhique que nous appelons la révolution humaine est la clé de la réussite individuelle et de la rencontre entre l'individu et son monde. Elle ne nécessite pas de devenir quelqu'un d'autre, ni de se transformer, ni de tout quitter ou de tout abandonner. La révolution humaine s'opère dans la vie que nous avons, dans notre quotidien, au milieu de nos réalités agréables ou désagréables.
En pratiquant le bouddhisme Soka, nous avons la possibilité inattendue de faire sauter les verrous qui nous empêchent d'avancer et de transformer ce que nous pensions être des obstacles en tremplins pour notre développement personnel. Ainsi, nous retrouvons la possibilité du choix. Et choisir c'est être libre...
En Picardie aussi, nous avons cette chance. Plusieurs groupes de discussion existent à Amiens, à Beauvais, à Compiègne et ailleurs qui se réunissent deux fois par mois pour discuter des enseignements de Nichiren et du bouddhisme Soka, et pour échanger leurs points de vue et partager leur expérience toute personnelle du bouddhisme au quotidien. Ces groupes sont ouverts et accueillent ceux et celles qui sont intéressés, curieux, désireux de voir des changements s'opérer pour le mieux dans leurs vies et dans l'environnement.

Pour en savoir plus :
— le site des réunions de discussions en France (http://www.reunion-discussion.fr)

Pour nous contacter :
— infos@reunion-discussion.fr

D'autres liens utiles sont disponibles en marge.